L’artichaut : gens pressés s’abstenir
J’ai longtemps été convaincue que les artichauts n’avaient pas bon goût. Et de surcroît, je ne comprenais guère l’intérêt d’un légume dont on jette finalement la majeure partie à la poubelle. Mais – heureusement – j’ai découvert il y a un an que ce légume en forme de fleur pouvait se prêter à toute une série de recettes les unes meilleures que les autres.
Historiquement parlant, l’artichaut commence à être vraiment en vogue au XVIe siècle - notamment avec Catherine de Medicis qui l’imposa à la cour de France. Souvent représenté dans les tableaux, il devient le protagoniste des tables françaises.
De mon côté, je crois que l’un des aspects qui me fascinent le plus dans ce légume réside dans la capacité qu’il a à éprouver ma patience. En effet, je déteste attendre ; or voici qu’effeuiller un simple artichaut m’oblige à ralentir et à « prendre mon temps ». Un légume thérapeutique, pourrait-on dire.
Je précise ma pensée :
- Il y a déjà l’attente liée au temps de cuisson. Si vous possédez un autocuiseur, vous faites partie des heureux élus qui peuvent manger un artichaut sans attendre un bail. Autrement, comme tout étudiant qui se respecte, vous prenez votre basique casserole dans laquelle vous faites cuire votre ingrédient à l’eau pendant 45 interminables minutes.
- Mais une fois l’artichaut cuit, voici que vous ne pouvez pas encore le manger tout de suite : tout juste sorti de la marmite, il est encore brûlant. Certes vous êtes malins : pour ne pas retarder l’heure du repas (votre estomac commence déjà à grogner) vous le passez sous l’eau froide en espérant ainsi accélérer les choses. Erreur : car les feuilles extérieures ont beau être ainsi devenues tièdes, il n’en reste pas moins que celles intérieures continuent d’être brûlantes et que vous ne pouvez donc les manger – sous peine de courir le risque de vous brûler les doigts ou la langue.
- Et il y a enfin cette longue progression vers le cœur de l’artichaut. En voici un bel art de l’attente : on commence par manger les feuilles du début où il n’y a presque rien pour ensuite aller toujours plus en avant, toujours plus en avant, jusqu’à atteindre enfin la partie la plus goûteuse du légume. Que de préliminaires avant d'atteindre le but convoité !
Mais ça en vaut bien le coup : avec une bonne vinaigrette, pour accompagner pâtes ou riz, ou encore farci avec de la viande ou de la chapelure.. c’est toujours un régal. Et surtout profitez de l’artichaut pendant la si brève période où il apparaît sur les étals : vous l’avez attendu tellement longtemps et il disparaît si vite!