Le manuel d'Epictète (extrait)
L’autre jour, j’attendais un ami dans le froid et la pluie : pour m’abriter, je suis donc entrée dans la librairie juste à côté. Je flânais sans véritable but quand je suis tombée sur une édition de poche sympa regroupant quelques textes philosophiques : parmi eux, il y avait Le Manuel d’Epictète. J’ai toujours beaucoup aimé ce condensé de doctrine stoïcienne… et cela m’a rappelé un passage de cet ouvrage où la vie humaine est mise en parallèle avec un banquet. C’est donc en lien avec le thème de mon blog, non ?
Souviens-toi que tu dois te comporter dans la vie comme dans un festin. Le plat qui circule arrive à toi : étends la main et prends avec discrétion. Il passe plus loin : ne le retiens pas. Il n’est pas encore arrivé : ne le devance pas de loin par tes désirs, attends qu’il arrive à toi. Fais-en de même pour des enfants, pour une femme, pour des charges publiques, pour de l’argent ; et tu seras digne de t’asseoir un jour à la table des dieux. Mais si l’on te sert et que tu ne prennes rien, que tu dédaignes de prendre, alors tu ne seras pas seulement le convive des dieux, tu seras leur collègue. C’est en se conduisant ainsi que Diogène, qu’Héraclite et ceux qui leur ressemblent ont mérité d’être appelés des hommes divins, comme ils l’étaient en effet.
Epictète est un stoïcien : il pense donc qu’il y a un série de biens terrestres que l’on doit mépriser, en particulier tous ceux qui ne dépendent pas de nous : l’argent, la bonne réputation, l’amour de quelqu’un… C’est ce type de choses que le philosophe compare à des plats qui passent alors que l’on est assis à table : il ne sert à rien de bousculer les gens ou de se plaindre de la lenteur du service : ces choses n’arriveront que dans la Vie aura décidé de vous les envoyer.
La deuxième partie énonce une autre possibilité : le plat arrive à nous mais nous ne prenons rien. Cela s’explique car en bon stoïcien, Epictète considère que l’homme se doit d’être indépendant et vertueux : quel intérêt ces biens terrestres peuvent-ils avoir ? La vie vous offre plein d’argent ? Et alors ? Le bonheur, vous pouvez vraiment l’acheter ? C’est cela qui va réellement vous rendre heureux ?
Je me doute que beaucoup d’entre vous n’apprécieront pas les positions du philosophe grec : l’argent ne rend peut-être pas à proprement parler heureux mais peut décidément y contribuer, non ? Toutefois… j’aime beaucoup ce texte : il nous met en garde contre nos appétits, notre goinfrerie, notre course après des biens… qui, finalement, risque seulement de nous empoisonner.
